Afrique de l'Ouest: Les Mauritaniens sont ambivalents face à la Migration et à l'intégration régionale

Près de deux tiers des citoyens s'opposent à la libre circulation des populations ouest-africaines à travers les frontières pour le commerce ou le travail.

Key findings

  • Environ trois Mauritaniens sur 10 (29%) disent avoir pensé quitter la Mauritanie pour aller vivre dans un autre pays de manière durable. o Parmi ceux qui ont pensé à émigrer, la grande majorité évoquent la recherche d'un emploi ou de meilleures opportunités économiques comme principal motif, et l'Amérique du Nord (32%), l'Europe (25%) et un autre pays en Afrique (25%) sont les destinations les plus convoitées.
  • Près des deux tiers (65%) des citoyens mauritaniens estiment qu'il est nuisible pour l'économie nationale que des immigrants viennent vivre et travailler pendant plusieurs années dans leur pays.
  • La majorité des Mauritaniens disent « aimer » ou être indifférents à l'idée d'avoir pour voisins des réfugiés (58%) ou des immigrés ou travailleurs étrangers (52%), mais s'opposent à ce que des immigrés occupent des emplois peu prisés par les Mauritaniens (60%), embauchent des citoyens mauritaniens (61%) ou épousent un membre de leur famille (68%).
  • Plus de six Mauritaniens sur 10 (64%) pensent que les personnes vivant en Afrique de l'Ouest ne devraient pas pouvoir franchir librement les frontières internationales pour faire du commerce ou travailler dans d'autres pays.
  • Seulement 4% des répondants déclarent avoir connaissance de la Zone de Libre Echange Continental Africain (ZLECAf).
  • La moitié (50%) des citoyens souhaitent que le gouvernement limite le commerce avec les autres pays afin de protéger les producteurs mauritaniens.

L'Afrique est un continent marqué par d'importants flux migratoires tant internes qu'externes, influencés par des facteurs économiques, politiques et climatiques. Environ 80% des migrations africaines se font à l'intérieur du continent (Organisation Internationale pour les Migrations, 2020). Ces déplacements trouvent leurs raisons dans des considérations économiques accusant un niveau de développement déficitaire ; la prolifération de conflits intercommunautaires, ethniques ou religieux ; ou encore les effets, de plus en plus alarmants, des changements climatiques (Organisation Internationale pour les Migrations, 2024).

Par ailleurs, l'Afrique reste un point de départ clé vers l'Europe et le Moyen-Orient, avec des nouvelles routes passant par la Tunisie, la Mauritanie et le Sénégal (Conseil de l'Union Européenne, 2025).

Dans ce contexte, la Mauritanie occupe une position stratégique en tant que pays de transit et de destination pour de nombreux migrants. Située à l'intersection de l'Afrique du Nord et de l'Afrique subsaharienne, elle accueille environ 75.000 migrants, principalement issus d'Afrique de l'Ouest et du Sahel (Organisation Internationale pour les Migrations, 2023).

Les immigrants représentent environ 9% de la population active en Mauritanie, contribuant à des secteurs clés comme l'agriculture, la pêche et le commerce informel (Banque Mondiale, 2023). Malgré leur apport économique, leur présence suscite des inquiétudes, notamment en milieu urbain, face à la concurrence en matière d'emploi et d'accès aux infrastructures et services sociaux. Il est à noter que cette migration revêt, de plus en plus, un aspect irrégulier conduisant, à termes, à un durcissement probable de la politique mauritanienne en la matière et à une hostilité croissante des populations hôtes.

En parallèle, l'émigration connaît une progression marquée en Mauritanie, où environ 10% de la population vit à l'étranger (Sidiya, 2020). Majoritairement régulière, cette émigration est alimentée par des facteurs économiques, notamment un taux de chômage des jeunes de 32% (Programme des Nations Unies pour le Développement, 2023). De plus, les envois de fonds de la diaspora représentaient 0,57% du produit intérieur brut en 2023 (TheGlobalEconomy.com, 2025).

Cette dépêche rend compte d'un module d'enquête spécial inclus dans le questionnaire Afrobarometer Round 10 pour explorer les expériences et les perceptions des Mauritaniens sur la migration et les échanges commerciaux.

Environ trois Mauritaniens sur 10 déclarent avoir envisagé d'émigrer pour s'installer durablement à l'étranger. Parmi eux, la recherche d'un emploi ou de meilleures opportunités économiques est le principal moteur de cette aspiration. Les destinations les plus convoitées sont l'Occident et d'autres pays africains.

Mais si l'émigration attire de nombreux citoyens, l'opinion publique mauritanienne demeure largement réticente à l'accueil d'étrangers. Près des deux tiers des répondants estiment que la présence des travailleurs étrangers nuit à l'économie nationale.

Cette réserve se manifeste également dans les attitudes vis-à-vis des immigrés au quotidien. Tandis que la majorité des citoyens se disent favorables ou indifférents à l'idée d'avoir pour voisins des réfugiés ou des immigrés/travailleurs étrangers, la plupart des citoyens rejettent l'idée que des étrangers puissent occuper des emplois peu prisés par les Mauritaniens, embaucher des nationaux ou encore épouser un membre de leur famille.

Ces réticences se prolongent dans les perceptions sur l'intégration régionale. Plus de six répondants sur 10 s'opposent à la libre circulation des personnes en Afrique de l'Ouest pour le commerce ou le travail. Une position qui contraste avec l'idéologie panafricaine portée par la Zone de Libre-Echange Continentale Africaine (ZLECAf), dont seulement une infime partie des citoyens mauritaniens déclarent avoir entendu parler.

En plus, la moitié des répondants souhaitent que leur gouvernement limite le commerce avec les autres pays afin de protéger les producteurs mauritaniens.

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